C’est un atelier proposé par Chef&Sommelier (groupe ARC) dans le cadre du salon de la RVF qui a permis d’aborder ce thème.
Philippe Faure-Brac, meilleur sommelier du monde en 1992 (et peu plus que cela), avait été missionné pour l’animer.
On a donc testé 4 vins blancs en sa compagnie…:
– Domaine d’Elise 2012 – Chablis – Chardonnay élevé en cuve inox
– Ch. Le Sartre 2011 sur Pessac – 90% sauvignon blanc, élevage sur lies en barriques
– D. du Closel – Le clos du papillon 2010 – Savennieres – Chenin VV – élevage en barrique sur lies
– Chapoutier – De l’Orée 2010 – Ermitage – Marsanne V V – élevage en fût
… dans 3 verres différents:
– le verre Inao, un standard
– le verre Fruity de C&S (gamme Arom’up) étudié pour développer les arômes fruités (vendu entre autour de 7€)
– le verre Oaky de C&S permettant de révéler les arômes tertiaires (c’est le verre qui était fourni lors du salon de la RVF) .
Constat simple, le verre influe directement la perception qu’on aura du vin.
On peut s’en douter mais faire ce type de test rend la chose vraiment frappante.
Quelques notes de dégustation rapides pour s’en rendre compte (et mes préférences sous forme d’étoiles) :
– Verre Fruity de C&S
* Chablis : Le nez est vif, les parfums plus volatiles, le ressenti est plus frais, spontané, floral ***
* Pessac : Là encore, le verre rend le vin plus charmeur ***
* Savennieres : Beau vin riche et à attendre. Fruity révèle le côté très mur de la fin de bouche mais aussi le « minéral » et l’acidité **
* Ermitage : Très beau vin, profond, très riche, trop à ce stade. Le verre pointe le boisé du vin et fait perdre au vin un peu de sa cohérence ** (pour le nez).
– Verre Inao
* Chablis : Le vin tombe sur le bout de la langue, manque d’expression *
* Pessac : Le variétal est exacerbé, grosse perception du sauvignon, too much *
* Savennieres : Le verre absorbe une certaine complexité du vin et le rend gourmand, plus facile (mais c’est aussi un défaut) **
* Ermitage : Lui aussi fait ressortir le déséquilibre lié au bois.
– Verre Oaky de C&S
* Chablis : Le vin est plus lourd, plus gras. Les avis dans l’audience divergent, certains préfèrent les sensation issues de ce verre. Selon moi, on perd en plaisir. **
* Pessac : Le verre transcende les épices, le bois, la vanille. Pour qui aime. moi je préfère le raisin. *
* Savennieres : Le verre est large. Philippe Faure Brac indique qu’il va permettre au vin de s’aérer plus vite et il en a besoin. Lui aussi s’amuse avec la maturité et les effets compotés ***
* Ermitage : Grosse concentration des arômes au nez. Oaky donne plus d’équilibre, plus de longueur, acacia agrumes. Il rend le boisé plus cohérent. Notre Sommelier (et Chef 🙂 indique que le verre révèle « la dimension inhumaine du vin » ***.
Pas de doute, les verres portent bien leur nom. Fruity travaille le fruit, la minéralité, le floral quand Oaky joue sur la profondeur, la complexité..le bois aussi.
On peut donc choisir le verre en fonction du vin mais aussi en fonction de ses gouts, sous entendu en fonction des sensations qu’on veut accentuer.
Passé le constat, Philippe Faure Bac pointe les éléments qui impactent ses sensations techniques mais aussi, comme il aime à le dire, les « émotions ».
Qu’est-ce qui fait un bon verre ?
– la solidité.. qu’il dure (il laisse tomber le verre sur la moquette qui tient le choc)
– la transparence voire l’éclat: il doit laisser passer la lumière et ne joue pas avec (même après 2000 lavages machines, là c’est la restaurateur qui parle)
– un buvan fin, ici 0.9mm mais pas trop pour que le verre appuie la sensation …et résiste (le verre n’est pas facile à digérer…)
– une cheminée rétrécie pour que les arômes convergent, on reviendra sur ce point
– une grande surface d’oxygénation, d’où naissent les arômes
– une jambe ni trop courte, pour que la main n’impacte pas la température du breuvage, ni trop haute, afin de maintenir l’équilibre du verre.
Philippe Faure Bac a justement insisté sur l’inclinaison de la paraison. Plus il y a d’angle, plus il y aura de vin qui va entrer en bouche dès l’attaque.
Et cette inclinaison change beaucoup de choses ! Si le vin entre doucement, il arrive en haut de la langue, zone plus sensible au sucré, quand le fond de bouche est plus réceptif à l’amertume et ses cotés à l’acidité.
On a d’ailleurs fait un test très intéressant que je vous invite à reproduire. Prenez votre verre habituel.
1-Prenez le par la base du pied et buvez. Sentez où le vin arrive en bouche.
2-Tenez le normalement, en haut de la jambe au 2/3.
3- Enfin tenez le calice dans la paume de la main, en faisant ce que vous ne faites jamais. Voyez comme le vin va alors loin en bouche. Et déjà vous gagnez en profondeur mais perdez en acidité.
Bref, avec un même verre pour un même vin (toutes choses égales par ailleurs), on peut avoir des perceptions sensiblement modifiées. C’est dire si la dégustation est un art et qu’il convient de prendre les avis avec recul…
D’autant que la perception du vin est aussi influencée par l’oxygénation, la lumière, la température (autre occasion de faire des tests de dégustation chez vous), l’année, la conservation, le dégustateur et j’en passe.
Finissons avec la petite citation qui va bien
» On ne boit pas pour oublier. On boit pour se souvenir ».
Les verres peuvent aider à sa souvenir et la présence d’un maître sommelier comme Philippe Faure-Brac aussi !
Plus d’infos
– sur le site de Chef&Sommelier
– sur le restaurant tenu par Philippe Faure-Brac
Merci pour ce compte rendu très éclairant.
A tester avec Catherine et les garçons.